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Colloque de restitution francophone du projet FireParadox


Pourquoi cet article ?

FireParadox ne vous évoque sûrement pas de prime abord un lien avec la géomatique… et pourtant lorsque vous saurez que ce projet a trait aux feux de forêts, certains d’entre vous feront la connexion. Pour les autres, sachez que la gestion des incendies de forêts, comme beaucoup d’autres risques, sont gérés grâce aux efforts fournis dans le domaine des SIG, de la télédétection, des modèles spatiaux… bref, la problématique a sa place sur le PortailSIG !!



Le but de cet article est de sensibiliser rapidement les lecteurs sur les problèmes actuels des feux de forêts et présenter quelques outils géomatiques dédiés. Je donne un certain nombre de liens en fin d’articles pour ceux que cela intéresse.

Contexte de l’évènement

Le projet FireParadox est intégré au 6ème Programme Cadre pour la recherche et le développement, ayant pour sujet la Gestion Intégrée des feux de forêt. Il a débuté en 2006 et s’est achevé fin 2009. Le colloque de restitution international s’est déroulé en février 2010 à Fribourg dans les locaux du Global Fire Monitoring Center (cf. liens en bas d’article). J’ai assisté au colloque de restitution francophone le 09 novembre 2010 et je vous fais un retour (qui arrive tard j’en suis navré !!)

Ce projet a concentré 36 partenaires répartis dans 16 pays : des universitaires, des instituts de recherche, des services de gestion des feux, des organisations internationales, des associations et des PME.



Pays participants

Le choix de cette thématique s’est justifié par l’émergence d’un réel problème en Europe : une politique de gestion des feux déséquilibrée. L’abandon d’un grand nombre de pratiques agro-sylvo­-pastorales a conduit en quelques décennies à une dangereuse accumulation des combustibles forestiers et sub-forestiers.

L’usage des sols a changé, le nombre d’exploitants agricoles a fortement diminué, perdant ainsi des savoirs-faires ancestraux. La résultante est une transformation en profondeur des paysages, dont le couvert végétal devient plus dense et homogène.

Pourtant, les espaces forestiers sont en partie soumis à la pression de notre société moderne : développement urbain, loisirs toujours plus nombreux, auxquels il convient d’ajouter l’exploitation forestière et les reliquats d’exploitations pastorales.

La conjugaison de ces facteurs crée un risque réel pour les biens et les personnes, qui se concentrent dans les zones d’interface habitat/forêt. Ces zones sont directement soumises au risque d’incendie, soit comme zone préférentielle de départ de feu, soit comme zone vulnérable. Dans cette situation, il convient d’agir vite lorsque le feu se présente.

Illustration de la mutation des paysages

Désormais en Europe, une place prépondérante est donnée à la lutte contre les incendies, dans une politique d’intervention immédiate et massive. On parle d’exclusion systématique du feu. Or, cette pratique tend à accentuer les probabilités d’éclosions et de propagation de grands feux.

Il faut savoir que le feu est un phénomène naturel nécessaire au renouvellement des écosystèmes. Intégré dans une démarche agri-sylvo-pastorale, il permet de garder le milieu ouvert et de fournir du fourrage aux cheptels.

Totalement exclu, le régime de feu de l’écosystème auquel il était lié s’en trouve perturbé. Cela engendre de graves problèmes écologiques :
 

  • Certaines espèces dépendent du feu pour leur perpétuation, soit parce qu’elles sont pyro-dépendantes, soit parce qu’elles affectionnent les milieux ouverts et enrichis par les cendres. Lorsqu’il n’y a plus de feu, leur reproduction est compromise et/ou les espaces ouverts n’existent plus.
  • Ou à l’inverse parce que certaines espèces ne peuvent supporter un feu de trop grande intensité. L’accumulation de combustible favorise le développement de feux très puissants qui ont pour conséquence la mutation totale de la station, c'est-à-dire le retour au début de la série de végétation voire le changement de série. (« stand replacement level » en anglais).

Dommageable

Bénéfique

Diagramme logique de la gestion intégrée du feu

Ce projet a permis de croiser des pratiques d’utilisation très variées : utilisation traditionnelle, brûlage dirigé et feu tactique. Egalement, remplir les objectifs suivants : contrôle du combustible, gestion des parcours, pratiques agricoles et gestion des habitats. La gestion intégrée des incendies, c’est comprendre, reconnaître et réguler le phénomène, apprendre à vivre avec et sensibiliser le public pour introduire une culture du feu.

Le projet a développé 4 axes majeurs :
 

  • Le développement d’outils, essentiellement basés sur des applications géomatiques ;
  • La promotion de l’utilisation du feu ;
  • La diffusion de la connaissance ;
  • La gestion intégrée du feu.


Je ne développerais dans cet article que le volet répondant au développement d’outils utilisables dans un SIG. Les progiciels et modèles présentés ci-après sont dit « spatialement explicites », c'est-à-dire qu’au moins une partie des entrées et des sorties (inputs et outputs en anglais) sont de nature spatiale, qu’ils sont donc visualisables et modifiables à partir d’outils dédiés à la cartographie numérique.
 

Les modèles de propagation

L’agence MTDA d’Aix en Provence a présenté un simulateur de propagation à grande échelle qu’elle a mis au point : le modèle VESTA.

Son fonctionnement est basé sur des algorithmes purement physiques (des formules mathématiques), c'est-à-dire qu’ils reproduisent au plus prés le comportement du feu, de la pyrolyse à la propagation de chaleur => http://mtda.fr/vesta/wiki/DevelopmentDocs/FiretecModel

Il prend en compte des équations « paramétriques » basées sur des lois du même type, elles mêmes fondées sur de longues séries de mesures. Par exemple, on sait que pour un vent à 10m/s, une garrigue à Chêne kermès (Quercus ilex) d’1 mètre de haut avec une faible concentration en haut permet un taux de propagation de 0,3m/s. Il s’agit de recréer au mieux l’interaction des différents paramètres du feu pour un calcul le plus juste possible.

Comme dans toute simulation, il existe des variables à prendre en compte, par exemple :

  • La hauteur de la végétation ;
  • Le taux de recouvrement ;
  • La densité de matériel ligneux ;
  • …etc.


Ce simulateur est « open source », c'est-à-dire qu’il peut-être modifié si l’utilisateur souhaite utiliser des algorithmes de propagation différents et ainsi procéder à des tests de validation des résultats obtenus.

Il se décompose en un modèle de calcul du phénomène physique du feu et un modèle de propagation de cellule en cellule.

Pour optimiser son fonctionnement, le modèle de vent WindNinja a été inclus dans le simulateur.

Les extrants de ce simulateur sont directement utilisables pour la cartographie des risques (en application des PPRif) :

  • Calcul automatique de l’intensité ;
  • Calcul de la surface menacée ;
  • Calcul de la probabilité d’incendie.


Pour télécharger le modèle : http://www.mtda.fr/vesta

La modélisation des interfaces habitat/forêt

Le CEMAGREF d’Aix-en-Provence a développé un progiciel d’analyse spatial, une extension d’ArcInfo (ESRI) qui permet de modéliser les zones d’interface habitat/forêt (IHF). Les objectifs de cet outil sont les suivants :
 

  • Cartographier les IHF sur de grandes surfaces et à des échelles multiples ;
  • Développer une méthode basée sur des critères spatiaux simples à construire et à combiner ;
  • Evaluer la vulnérabilité des biens en zone d’IHF.

Avant

Après

Les IHF  se multiplient dans un contexte de métropolisation des territoires. Lorsque l’on sait que 90% des départs de feux sont d’origine humaine, ces zones sont autant de sources privilégiées.

Le logiciel WUImap permet l’évaluation des types de paysages et la cartographie automatique des IHF en fonction de la nature du couvert végétal et la dissémination de l’habitat. Ce logiciel est en libre accès et nécessite une licence ArcInfo pour son utilisation. Il se base sur la typologie présentée ci-dessous.

La typologie des IHF

Interface d'accueil du logiciel


Cartographie des types d'IHF

La modélisation de l’aléa feu de forêt pour la production de carte d’aléa

La société grecque Omikron, en partenariat avec le CEMAGREF a développé un outil de cartographie automatique de l’aléa feux de forêts : FHM, pour Fire Hazard Mapper. Il nécessite une licence ArcInfo (ESRI).

Comme tous les modèles de ce type, il requiert l’intégration d’un grand nombre de variables. Il ne faut donc pas négliger le travail de préparation, qui est souvent bien plus long que la génération des résultats.

Ce modèle peut  agir en corrélation avec le logiciel WUImap. D’autre part, un autre modèle  a été dérivé de FHM pour l’identification automatique des zones pressenties pour les feux prescrits à but préventif : PBM, pour Prescribed Burning Mapper.

Diagramme conceptuel de l'outil

Interface de calcul de la probabilité d'occurrence

Exemple de cartographie de l'intensité potentielle

Résultat de la modélisation des zones d'aléa

Conclusion

Le projet FireParadox a permis le développement de nouveaux outils qui viennent enfin supplanter, au moins en partie, les outils américains les plus connus, tels que FlamMap et Farsite. L’Europe dispose enfin d’une base de données commune sur l’identification des combustibles et a mis en place une réflexion à long terme sur l’utilisation du feu dans la sauvegarde des paysages, de la biodiversité et enfin des personnes et des biens, la forêt y compris.

Dans une dynamique de changement climatique, ce type d’outils peut-être mis à profit pour un grand nombre d’études, et les sujets ne manquent pas.

Alors au travail les géomaticiens ! En espérant vous avoir donné envie de vous pencher sur le sujet.

 

François-Nicolas ROBINNE

Chargé d’études géomatiques

 


Site officiel : Fire Paradox
Site officiel : Fire Intuition (restitution)
Autres Liens : Le compte-rendu officiel
Autres Liens : Un guide rapide pour la compréhension du projet sur le site de l'EFI
Autres Liens : Beaucoup d'infos sur les feux de forêts en France
Autres Liens : Le Global Fire Monitoring Center, la référence internationale
Autres Liens : La référence européenne
Autres Liens : De nombreux modèles spatiaux bien connus!
Autres Liens : D'autres modèles non moins connus!

Commentaires

Pour rassurer

Pour rassurer François-Nicolas, le portailSIG est ce qu'en font les rédacteurs. Et la rédaction de textes liés à des problématiques concrètes et tout à fait intéressant, c'est vrai que majoritairement il s'agit de textes techniques liés à des logiciels ou des procédures, mais cela n'exclut absolument pas les autres thèmes. Gardons à l'esprit que les SIG ne servent pas à grand chose sans problématique !

Merci pour ce dossier très intéressant !

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