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Le terrain de la géographie physique littorale : une spatialisation politique, une modélisation numérique et une structuration en discours

TitreLe terrain de la géographie physique littorale : une spatialisation politique, une modélisation numérique et une structuration en discours
Type de publicationConference Paper
Nouvelles publications2008
AuteursRegnauld, Hervé, and Olivier Planchon
Nom du typeA travers l'espace de la méthode : les dimensions du terrain en géographie
Année de publication2008
Mots clésgéomorphologie littorale, politique, recherche scientifique, Terrain
Résumé

Cette communication se propose d'explorer les relations entre le rôle du politique et le rôle du scientifique dans la définition d'un périmètre spatial et conceptuel de recherche. Elle prend pour cadre la pratique de la géomorphologie littorale, discipline définie par un type de terrain identifiable à un lieu. Dans un premier temps la communication établit les bases épistémologiques qui autorisent deux conclusions spécifiques au littoral (mais exportables ailleurs ?) 1) La recherche universitaire publique doit rendre compte de son travail aux puissances publiques qui sont des entités territoriales. La dimension spatiale joue donc non seulement dans la définition de l'objet d'étude mais dans la dimension d'évaluation de la cohérence du savoir élaboré : le savoir élaboré doit être valable au long du littoral considéré, ce qui implique une vision assez linéaire de l'espace. 2) Les collectivités territoriales ont la capacité à formuler des problématiques scientifiques auxquelles les scientifiques universitaires n'ont pas encore pensé. Il en résulte que la définition de la pertinence d'un terrain d'étude n'est pas du seul ressort de la science. Dans un second temps la communication s'attache à présenter deux sortes de configurations spatiales que la géomorphologie littorale et la demande politique s'accordent à désigner comme terrain. Des travaux étudient une portion de littoral continue et d'établissent des bilans centrés sur le couple érosion/accrétion. D'autres travaux une série de sites disjoints dans l'espace mais ayant des comportements semblables. La première catégorie pourrait être illustrée par la thèse de R.Paskoff (la côte du Chili central), la seconde par celle de F.Verger (Marais et Waddens du littoral français). On aurait la même situation dans le domaine anglo-saxon en comparant les travaux de M.Bray et ceux de J Orford, ou de J Goff. Ces deux approches de la notion de terrain sont toutes les deux fondées sur une base théorique pertinente et sont toutes deux socialement cohérentes. 1) Une portion continue de littoral peut être appréhendée selon le concept de cellule sédimentaire, en tant qu'espace physique parcouru par des flux de sédiments. Pour comprendre l'évolution d'un littoral il faut étudier ensemble les sites sources (qui s'érodent), les sites puits (qui accumulent) et les sites de transit (dont la forme varie avec le flux latéral de matière). C'est la condition pour faire des bilans. Il convient de délimiter le « terrain » d'étude pour qu'il contienne l'ensemble des sites concernés. Le modèle conceptuel peut être traduit en modèle numérique avec, par exemple, des équations différentielles (quantité de flux par quantité de temps). Du point de vue de l'aménagement littoral, la définition, sur le terrain à aménager, des différentes cellules sédimentaires est le préalable à toute intervention. 2) Une collection discrète de formes types, définies par une homogénéité lithologique (vasières, cordons de galet, flèches de sable) est un système appréhendé comme le résultat de forçages de contrôles et de résiliences. L'ensemble peut être rassemblé sous le concept de morpho/hydro dynamisme. Il y a de l'énergie qui mobilise un matériel qui le distribue dans l'espace (ce qui crée une forme) et cette forme a une d'inertie qui la fait réagir plus ou moins aux événements qui l'atteignent. Sur le terrain la connaissance des impacts d'une tempête sur un site est la condition première pour gérer la permanence d'un géosystème qu'une société pense devoir «protéger». Ces deux pratiques supposent deux conceptions du terrain (continu ou discret). Elles ne s'opposent pas pour autant. Elles ont en commun de revendiquer une pertinence et une cohérence selon les exigences que J. Lévy distingue comme caractéristiques d'une science sociale. La pertinence vient de la tension théorie/expérimentation tandis que la cohérence se vérifie par le fait que le discours produit est utilisable par d'autres que les géomorphologues, c'est à dire par les aménageurs. Ces deux « terrains » n'opposent pas davantage un terrain naturaliste et un terrain modélisé. Ils sont indissociables puisque c'est le modèle qui détermine le découpage de l'espace étudié. En ce sens la géomorphologie littorale est une activité sociale classique qui privilégie un paradigme (parmi deux), qui en déduit un cadre spatial et produit un savoir que les acteurs locaux de l'aménagement peuvent réinvestir, quasiment en temps réel. Le fait original est que ce classicisme n'est aucunement contradictoire avec une modélisation numérique. Dans un troisième temps, la communication aborde l'actualité de la discipline qui incite à voir cette priorité d'un paradigme sous un angle nouveau. Il faut penser avec un concept récent qui a pour intérêt de joindre les deux approches (continu/discontinu). Il s'agit de l' « articulation géomorphologique » (F.Dolique) qui vise à penser les relations entre deux formes composées de matériels distincts mais voisines, au point que le comportement de l'une influe sur le comportement de l'autre (un cordon de galet reposant sur un cordon sableux, une dune sur une vasière par exemple). Le concept de cellule sédimentaire ne fonctionne pas parce que l'érosion d'une vasière ne fournit pas de galets à la flèche de sable. Celui de morphodynamique non plus car ce sont des objets dont on ne peut pas modéliser les interactions : les équations qui décrivent le mouvement du sable ne sont pas valables pour la vase (ou les galets) et l'on ne sait pas décrire le mouvement à l'interface sable/galet (ou sable vase). On doit donc penser le terrain comme l'interface spatial et l'articulation temporelle entre deux entités litho-hétérogènes. C'est exactement ce que, aujourd'hui, personne ne sait encore modéliser tant la variabilité possible est grande. La discipline est donc devant une sorte de défi : elle constate qu'elle a déjà les outils conceptuels pour désigner un terrain « nouveau » mais pas encore les outils théoriques pour l'étudier. Mais ce terrain nouveau a attiré l'attention des politiques parce qu'il leur paraît « ingérable ». Il appartient aux géomorphologues de produire un savoir cohérent sur ces nouveaux terrains.

URLhttp://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00358345

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